Dérive des Services Publics : Les Dangers du Nouveau Modèle France Travail
La transformation en profondeur du service public de l’emploi avec la création de France Travail inquiète de plus en plus. Derrière une apparente volonté d’efficacité, la réforme pose de nombreuses questions sur le désengagement de l’État, les suppressions de postes et les risques accrus pour les usagers. La FSU Emploi, à travers son action au CSEC (Comité Social et Économique Central), tire la sonnette d’alarme sur ces dérives et les effets dévastateurs d’un modèle où les moyens alloués ne suffiront jamais à assurer un service public digne de ce nom.
Un désengagement budgétaire inquiétant
L’un des principaux enjeux soulevés par la FSU Emploi réside dans le désengagement budgétaire de l’État dans le budget global de France Travail.
En réduisant progressivement sa participation au financement de France Travail, l’État met en péril notre capacité à remplir nos missions essentielles et ceci au profit d’une participation en pourcentage de l’UNEDIC qui est donc éminemment liée au taux de chômage…. Ce retrait de l’Etat des financements publics s’accompagne d’un objectif de rationalisation des coûts, qui se traduit par des suppressions de postes appelés aussi gains d’efficience.
Par ailleurs la réduction avérée de 500 postes dès 2025, puis celle annoncée de 3500 d’ici 2027, est une preuve flagrante de cette logique d’austérité.
Ce désengagement de l’État ne se limite pas à une diminution des effectifs.
On peut aussi noter que les moyens matériels, notamment les outils numériques nécessaires à la mise en œuvre de cette vaste réforme, ne sont pas à la hauteur des enjeux.
La FSU Emploi et ses élus du CSEC même s’ils s’opposent à toute automatisation de l’inscription, constatent que les systèmes d’information (SI) qui doivent assurer l’inscription des usagers, notamment des allocataires du RSA, ne sont pas suffisamment préparés. Des défaillances dans la transmission des données entre les différentes institutions (CAF, MSA, France Travail) risquent d’entraîner des échecs massifs dans les inscriptions automatiques. Cela pourrait avoir des conséquences dramatiques pour les demandeurs d’emploi, déjà en situation de précarité comme sur notre organisation interne et de fait sur les conditions de travail de tous les personnels
Suppression d’emplois et précarisation des effectifs
Pour compenser la baisse des moyens humains, France Travail fait de plus en plus appel à des Volontaires du Service Civique (VSC) pour assurer des missions permanentes, notamment à l’accueil des usagers. Le recours massif (X3) à ces volontaires, sans formation adéquate ni reconnaissance des compétences, met en lumière une précarisation rampante des effectifs.
En effet, trop souvent ces VSC occupent des postes pérennes sans pourtant le salaire, ni les protections sociales ou les avantages dont bénéficient les salariés permanents.
Cette stratégie ne fait que fragiliser davantage le service public. En plus d’être sous-payés, ces volontaires ne disposent pas des ressources nécessaires pour garantir un accueil et un accompagnement de qualité.
La FSU emploi se doit d’avoir un haut degré d’exigence par rapport au SPE que nous voulons qui puisse être digne d’un service de qualité que nous devons à nos usager.es
Dégradation des conditions de travail
En plus de tout le reste le 1er Janvier 2025 et la mise à plein de la réforme France Travail va entraîner une augmentation significative de la charge de travail pour les agents. L’inscription systématique de nouveaux publics, notamment les allocataires du RSA et les jeunes en mission locale, posera des problèmes majeurs. Actuellement, seuls 42 % des allocataires du RSA sont inscrits ; avec la réforme, cette proportion devra atteindre 100 %. Cela nécessite des ressources humaines supplémentaires pour gérer ce flux massif de nouveaux inscrits, d’autant plus que de nombreux dossiers devront être finalisés manuellement en cas d’échec des inscriptions automatiques.
Or, le gouvernement actuel, dans la même veine que le précédent, n’a prévu aucune augmentation de moyens humains ou matériels pour faire face à cette surcharge de travail, pire l’heure est à l’austérité et à la compression des effectifs.
Les agents, déjà sous pression, devront compenser les défaillances des systèmes d’information, avec des conséquences directes sur leurs conditions de travail. Le risque de burn-out, d’absentéisme ou de licenciements pour inaptitude, déjà en hausse, ne pourra que s’aggraver. Le quoi qu’il en coûte a un prix sur la santé de nos personnels
La situation est d’autant plus critique que le projet d’évolution du processus d’inscription repose en grande partie sur des outils numériques non encore opérationnels. Si ces outils ne sont pas prêts en temps voulu, les agents devront intervenir manuellement pour assurer le suivi des dossiers, alourdissant encore leur charge de travail, le tout au mieux à effectif constant. La FSU Emploi alerte sur les risques que cela fait courrir notamment en termes de sécurité et de santé au travail des agent.es.
Un risque majeur pour les usagers
La précipitation avec laquelle cette réforme est mise en place va entraîner des conséquences dramatiques pour les usagers, notamment les plus précaires. En l’absence de garanties solides pour assurer la continuité des droits des demandeurs d’emploi, les défaillances dans les systèmes d’inscription automatiques pourraient priver temporairement de nombreux individus de leur allocation RSA ou de l’accompagnement auquel ils ont droit. Or, il s’agit là du dernier filet de sécurité financière.
De plus, l’aspect coercitif de la réforme, qui impose une inscription systématique de toustes dès lors qu’ils entendent prétendre à une allocation pourtant bien légitime, soulève des questions éthiques et pratiques.
En parallèle, le triplement des contrôles de la recherche d’emploi renforcera cette logique punitive, mettant encore davantage en danger les usagers les plus vulnérables.
Enfin, le fameux contrat d’engagement réciproque, qui sera généralisé en 2025, ajoute une couche supplémentaire de complexité et de risque pour l’équité. Ce contrat, qui imposera des objectifs d’insertion sociale et professionnelle hebdomadaires, entraînera des sanctions pour ceux qui ne parviennent pas à les remplir.
Conclusion : une réforme à haut risque pour les agent.es, les usager.es et le service public
Face à cette situation alarmante, la FSU Emploi appelle à une prise de conscience immédiate. Le service public de l’emploi, tel qu’il est aujourd’hui organisé, ne pourra pas remplir ses missions si l’État continue de se désengager financièrement et humainement.
La suppression de milliers de postes, la précarisation des effectifs, et la surcharge de travail des agents ne feront qu’aggraver les problèmes déjà existants.
Les élus FSU au CSEC ont mis en lumière les risques majeurs liés à cette réforme, tant pour les agents que pour les usagers. Il est impératif de renforcer les moyens humains et matériels pour garantir un service public de qualité, capable de répondre aux besoins des plus vulnérables. Sans cela, le projet France Travail sera un échec cuisant, avec des conséquences dramatiques pour l’ensemble du système de l’emploi en France, ses agent.es et ses usager.es. La FSU Emploi, pour éviter un effondrement du service public de l’emploi, appelle à un abandon de ce projet et a minima à un report de sa mise en œuvre, tant qu’un renforcement substantiel des ressources ne sera pas prévu et les moyens alloués.